Richardson Hitchins : La Nuit de la Reconnaissance à San Juan
Le mois de décembre s’est ouvert sous les lumières vives du Coliseo Roberto Clemente à San Juan, Porto Rico. C’est dans ce cadre que Richardson Hitchins s’est finalement affranchi de ses doutes, s’effondrant sur le ring avec les bras levés, savourant un moment tant attendu après avoir conquis le titre de champion IBF des poids super légers, à la suite d’une décision partagée le plaçant en tête contre Liam Paro.
C’est un combat marquant pour Hitchins, qui a non seulement eu l’honneur de mener la première grande soirée de Matchroom Boxing pour cette fin d’année, mais également de marquer son nom sur deux des trois cartes des juges, un résultat qui aurait pu, selon plusieurs observateurs, se solder par un verdict unanime.
Pour Hitchins, ce triomphe ne se mesure pas seulement par un titre. C’est la réalisation d’un rêve qu’il a caressé depuis le jour où il a enfilé ses premiers gants. À ses côtés, son entraîneur de longue date, Lenny Wilson, savourait en silence l’aboutissement d’années de dévouement et de travail acharné.
Wilson, qui a consacré sa vie à forger non seulement un boxeur, mais un homme prêt pour le grand cirque de la boxe, a toujours vu en Hitchins le potentiel à briller dans cette discipline. "J’étais réaliste,” a-t-il déclaré. “Je voyais ça m’échapper. C’était la passion que j’ai pour la boxe et celle que j’ai pour qu’il gagne." Cette passion, renforcée par une urgence palpable, émanait de chaque fibre de leur relation.
Le parcours de Wilson n’a pas été dépourvu de défis. Ancien combattant avec des rêves déchus lorsqu’il a été incarcéré pendant dix ans, Wilson a rencontré alors une figure marquante : Young Georgie Collins, un ancien partenaire d’entraînement de Sandy Saddler, qui a ravivé sa passion pour la boxe derrière les barreaux. “Il m’a enseigné comment lancer mon crochet gauche,” se remémore-t-il. Ce mentor a marqué le début d’une résilience qui allait façonner l’avenir de Wilson, comme lui-même l’explique avec ferveur.
À sa libération en 1990, Wilson s’illustre un temps en tant qu’assistant social avant que son amour pour la boxe ne le rattrape inéluctablement. Une aventure qui a débuté il y a 17 ans lorsqu’il entraînait Sadam Ali et a croisé la route de Hitchins alors que celui-ci n’était qu’un enfant de 10 ans. “Il se rappelait de moi des années après,” se souvient Wilson, qui a vu Hitchins grandir au sein de la salle de boxe.
C’est Aureliano Sosa, l’un des premiers entraîneurs de Hitchins, qui a finalement permis cette connexion durable. Sosa, touché par le potentiel de Hitchins, a insisté pour que Wilson vienne dans leur salle de boxe. “Je ne pouvais pas dire non,” admet Wilson. Avec une promesse simple, une relation forte mais délicate s’est bâtie, une confiance qui les a propulsés vers les plus hauts sommets de la boxe.
Au fur et à mesure de leur parcours, Hitchins a testé la patience de Wilson, mais la réputation du jeune homme n’a jamais été remise en question. Wilson a constamment mis Hitchins face à l’élite de la boxe, comme lorsqu’il a été mis en sparring avec Carlos Adames. Après une claque au visage, Wilson a pris la décision d’y croire. “Il a dit ‘trois’ lorsque je lui ai demandé combien de doigts je tenais, alors je lui ai dit de retourner sur le ring,” raconte Wilson, sûr d’avoir fait aboutir cette séance.
Les épreuves ont forgé ce duo. À chaque fois que Hitchins semblait prendre trop de confiance, Wilson le ramenait sur terre, un équilibre délicat qui a façonné le champion. Lorsqu’il a été demandé à d’autres combattants de Brooklyn de tester Hitchins, le retour était toujours le même : “Ce gamin est prêt.”
Le jour du combat à San Juan, tout a convergé. Wilson n’a pas seulement vu une victoire ; il a contemplé une consécration pour un jeune homme né dans les défis. “Il s’entraînait avec rien de moins que des champions du monde,” souligne Wilson. “C’était le meilleur, et maintenant, c’était son tour.”
De retour sur le ring, alors que Hitchins savourait sa victoire, Wilson échangeait des souvenirs, réfléchissant au sacrifice consenti pour chaque entraînement. “Il a fallu que je fasse tout le chemin depuis le Bronx pour arriver jusqu’ici,” disait-il.
Ce moment prenait une dimension bien plus profonde pour Wilson. Ce n’était pas qu’une simple ceinture pour lui ; c’était la validation de toute une vie de combats : un combat pour sa propre rédemption, son amour pour la boxe, et pour le jeune homme qui avait placé sa confiance en lui, même lorsque la route s’annonçait scabreuse.
Aujourd’hui, après près de trois décennies passées dans le travail social et alors qu’il se consacre pleinement à la formation des boxeurs, Wilson considère ce moment comme une rencontre transformative entre un entraîneur dévoué et un combattant passionné. “Peut-être que tout cela, c’était cette passion profonde pour la boxe – c’est ce que les gens ont vu cette nuit-là,” conclut-il. Une ode à l’amour du sport, un hommage à la résilience humaine.