Joseph Parker : Un Boxeur Gentil Dans Un Univers Impitoyable
Le mardi matin, Joseph Parker fait son entrée au Ballybrack Boxing Club sous une pluie battante, tel un hôte déterminé à saluer tous les membres présents, qu’il les connaisse ou non. Sa manière d’accueillir varie d’un geste amical à une accolade, un rappel délicat de sa réputation de bon gars dans un sport souvent perçu comme brutal. Ici, l’inclusivité de Parker ne peut que faire sourire, mais sa gentillesse soulève une question : dans un univers aussi compétitif que la boxe, n’est-ce pas un handicap ?
À l’école, on vous dira que le mot « gentil » peut sembler banal, tandis qu’un rendez-vous qui le décrit ainsi sent souvent la fin d’une relation, vous reléguant à la catégorie des amis. Dans le monde de la boxe, où la force et l’agressivité règnent, être « gentil » pourrait bien s’apparenter à une faiblesse. La douceur, la gentillesse peuvent apparaître comme l’antithèse de ce qu’un boxeur doit être une fois la première cloche sonnée.
Avant mon départ pour Dublin, j’ai confié à mon père mon intention de rencontrer Parker. Sa réponse fut frappante : « Joseph Parker est trop gentil pour la boxe. » Ces mots résonnèrent dans mon esprit, surtout après avoir regardé le biopic sur Bob Dylan où l’artiste, incarné par Timothée Chalamet, rédige des paroles légendaires tout en se faisant traiter de « type un peu désagréable ». Ce contraste m’a fait réfléchir : les plus grands artistes et sportifs ne doivent-ils pas, d’une manière ou d’une autre, posséder une part d’arrogance, ce qui pourrait expliquer pourquoi Parker, dans sa douce nature, pourrait avoir à se battre contre un fléau de gentillesse au sein de son propre métier ?
Joseph Parker n’est pas seulement un homme gentil ; il incarne une forme de gentillesse rare dans un environnement haussé par la rivalité et l’angoisse. On craint de s’attacher trop à lui, de craindre de le voir tomber, mais surtout d’imaginer un jour son sourire se transformer en douleur. Sa douceur le distingue, et elle provoque une inquiétude sincère chez ceux qui le côtoient. Je me souviens des paroles de Kerry Russell, son vidéaste : « Oh, il est comme ça, juste en marchant dans la rue. Il salue tout le monde. »
Les boxeurs, surtout en période d’entraînement, choisissent souvent de ne saluer que leurs entraîneurs et sparring-partners. Parker, en revanche, semble s’assurer que personne ne se sente négligé. Il pose même une question à un inconnu — « Comment ça va ? » — comme s’il mesurait l’importance de chacun. « Je me sens bien », déclare-t-il, avec un sourire qui en dit plus long que ses mots.
Son entraîneur, Andy Lee, arrivait toujours en avance pour préparer le gymnase, clouant des réservoirs de gaz butane pour réchauffer la salle. Les partenaires d’entraînement, tels que Boma Brown et Guido Vianello, se chauffaient déjà avant l’arrivée de Parker. Lee, imposant mais encourageant, donne des instructions qui résonnent avec une paradoxale tendresse : « Je veux que tu lui en fasses voir de toutes les couleurs. Donne-lui tout ce que tu as. » Dans le cercle du ring, la douleur devient un outil d’amélioration.
Cette dynamique unique de l’entrainement se transforme d’une certaine manière en son antithèse pendant le sparring : la douceur et la douleur se mêlent pour porter le boxeur à ses limites. Parker lui-même témoigne : « Ce n’est pas juste une question de frapper pour faire mal. Ils sont ici pour m’aider. » Ce respect mutuel taraude l’idée que, malgré le combat, l’amitié et la camaraderie doivent prévaloir.
Le gymnase, rempli de punch bags, témoigne des sacrifices et des luttes de la boxe, ornée de fresques de médaillés irlandais, des visages qui, eux aussi, ont connu la tourmente. La présence immuable de Parker, un homme au cœur amical, donne lieu à des dilemmes internes tout au long de ses entraînements. « Je suis un meilleur combattant maintenant parce que je suis un meilleur père et mari », déclare-t-il avec conviction.
À l’approche de son combat prévu contre Daniel Dubois, Parker avoue que cette transition de la douceur à l’agressivité est un passage nécessaire. L’entraînement devient alors une répétition générale de la réalité des combats, une approche pluridimensionnelle où la concentration règne. Son entraîneur, Lee, est impressionné par l’écoute de Parker, une qualité rare chez les boxeurs : « Il est un grand auditeur. Si je lui demande de faire quelque chose, il le fait tout de suite. »
Pourtant, Gary Lockhart, le coach en force et conditionnement, décrit la force intérieure de Parker avec couleur. « Joseph sait qu’il est bon, il n’a pas besoin de se faire passer pour quelqu’un d’autre. » Pendant que Parker s’entraîne, le bruit des gants frappant le sac résonne dans la pièce. Ses mouvements deviennent plus lents au fil de l’effort, mais chaque coup est imprégné d’une intensité palpable, malgré la fatigue.
À l’aube de son combat prochain, Parker sait qu’il doit surmonter les doutes. Après ses récentes défaites, il mentalise chaque étape. « Je sais ce que ça fait de perdre et d’entendre ces critiques. C’est difficile. Mais aujourd’hui, je suis un homme heureux. » Un homme qui apprend à naviguer à travers les complexités émotionnelles de la boxe, aimant à la fois sa famille et son sport.
Dans l’univers impitoyable de la boxe, avoir un cœur gentil pose question, mais pour Joseph Parker, cette dualité pourrait être la clé de son succès. Sa capacité à jongler entre la rigueur du combattant et la tendresse du père le rend peut-être plus fort que son apparente douceur ne le laisserait croire.