En cette première chronique de 2025, je me sens obligé d’évoquer la mémoire de Donato Paduano, un homme qui nous a malheureusement quittés à la fin de l’année 2024. Sa disparition a ravivé en moi une profonde réflexion sur notre mortalité et sur les héros de notre enfance. Pour moi, Paduano était un véritable monument de la boxe. Si, comme moi, vous avez grandi à Montréal, son nom ne pouvait que résonner. Surnommé « l’Ange du Ring », il a marqué les esprits et son nom a été le premier que j’ai associé à ce noble sport.
À l’âge de 17 ans, alors que je commençais à fréquenter les salles de boxe, j’ai eu la chance de le croiser au Club de Boxe Olympique de Montréal. Je me souviens encore de ce moment, cette tension palpable, ce frisson d’admiration en le voyant s’entraîner. « C’est Donato Paduano », ai-je pensé, émerveillé. Étaient-ce vraiment mes yeux ou l’aura d’un héros qui me frappait ?
À cette époque, Paduano était une figure légendaire, presque mythique. Entrer dans cette salle de sport, c’était comme pénétrer dans un autre temps, un lieu chargé d’histoire. Situé au troisième étage d’un bâtiment en béton au toit bitumé, l’endroit était imprégné de l’odeur de la sueur et de la résilience. Tout cela sous l’ambiance grise d’un cinéma des années passées. À l’époque, je payais un abonnement mensuel de 7 $, un luxe pour un adolescent.
Le décès de Paduano, à l’âge de 75 ans, m’a rappelé à quel point la vie est éphémère, même pour les plus grands. C’était un homme qui n’a pas pu goûter à une retraite à la hauteur de ses accomplissements, en grande partie à cause de ses problèmes de santé liés au diabète. Sa lutte personnelle a malheureusement overshadowé sa carrière si brillante.
Bien qu’il ait été un combattant d’exception, Paduano était plutôt en retrait et n’a pas eu la reconnaissance qu’il aurait méritée. Originaire d’Italie, il s’est hissé parmi les étoiles de Madison Square Garden, un exploit incroyable pour un boxeur venant de Montréal à une époque où New York était le centre névralgique de la boxe. Son nom figurait parmi ceux des plus grands, malgré la rude concurrence.
Il a croisé le fer avec des champions tels que Ken Buchanan et Emile Griffith, des adversaires de choix, mais a également participé à des rivalités locales, notamment contre Fernand Marcotte. Cependant, son manque de puissance a freiné ses ambitions. Bien qu’il ait compensé par sa rapidité, son habileté et sa résilience, Paduano n’avait pas le poids dans ses coups pour rivaliser au plus haut niveau. Des combats mémorables comme ceux contre Marcotte, où il a su se relever et donner du fil à retordre, témoignent de son talent apparent : un jab terrifiant, des déplacements efficaces, et une énergie débordante.
Son charisme le prédisposait à une carrière en dehors du ring, que ce soit à la radio ou à la télévision, mais, pour diverses raisons, cela ne s’est pas concrétisé. Malheureusement, il avait aussi ses démons, comme son penchant pour le jeu, qui lui a coûté une grande partie de sa fortune.
Je n’ai pas eu la chance de le voir à son apogée. Les quelques combats que j’ai pu voir se déroulaient lors de la fin de sa carrière, et c’est plutôt par le biais d’archives que j’ai pu apprécier son art pugilistique.
Sa mort représente pour moi la perte de mon premier héros de boxe, un symbole de mon adolescence. Ce fut un combat féroce qu’il a mené tout au long de sa vie, mais hélas, il a perdu cette dernière bataille.
Russ Anber est le fondateur et PDG de Rival Boxing, un entraîneur respecté dans le milieu, propriétaire de salle de sport et l’un des meilleurs enveloppeurs de mains du monde de la boxe. Il travaille avec des boxeurs de premier plan tels que Vasiliy Lomachenko, Oleksandr Usyk, Callum Smith, Zhanibek Alimkhanuly et Bakhram Murtazaliev.